Vous vous égarez M. Bueno


Posted by Jean-Pierre Voyer sur le Debord off on October 04, 1997


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Paris, 3 octobre 1997

Cher Monsieur Bueno,

Vous vous égarez. Vous reprochez à ma précédente lettre de n'avoir aucune substance. Elle en a au moins une : vous me reprochiez de prêter à Debord une conception aussi stupide du spectacle (ce sont vos termes [ et non les miens. Pour ma part, je ne trouve pas cette conception stupide, elle a le mérite d'essayer de traiter du prestige. Je ne trouve stupide que son aspect utilitariste, voir lettre précédente ]) que celle d'un usage spectaculaire de la marchandise. Donc, je vous montre immédiatement, preuves à l'appui, que tel était bien le cas, que telle était bien la conception du spectacle par Debord. Pas un instant je n'ai prétendu faire mienne cette conception, comme vous me le reprochez. Je l'ai déjà dit, vous n'êtes jamais content [ comment pourrait l'être ce …… puisqu'il ne répond jamais aux objections de son interlocuteur et toujours à côté de la question. A la suite de quoi le monsieur n'est pas content ] et ni la logique, ni la vergogne ne vous étouffent.

Je résume la thèse que j'expose dans ma Réponse à M-E Nabe: je soutiens que les prétendus ennemis de Debord sont parfaitement fondés à comprendre la notion de spectacle au sens de mass-media étant donné que nulle part, et malgré ses intentions, Debord n'est parvenu à en fournir une autre qui soit consistante, ce qui est extrêmement fâcheux pour quelqu'un qui prétend avoir écrit une théorie exacte de la société. Cette théorie exacte est vite jugée quand on voit quels sont ses thuriféraires aujourd'hui.

Nulle part je n'ai prétendu que Debord avait voulu écrire, ni même qu'il avait écrit en fait, une théorie des mass-media. Je prétends seulement que le prétendu concept de spectacle n'est qu'un mot vide de sens, un de plus, que jamais, malgré ses prétentions, Debord n'est parvenu à lui donner un contenu. Et donc que ses thuriféraires actuels sont parfaitement fondés à lui donner le sens qu'il leur plaira. De même c'est ce qui explique que vous pouviez entendre ce mot dans un sens qui vous convenait et moi dans un autre. Tout l'art de Debord a consisté à faire croire que ce mot, quand il l'employait, pouvait avoir un sens qui ne soit pas trivial. Mais ses films l'ont montré, quand il disait spectacle, il voyait des femmes nues. Et certes c'est un très charmant spectacle. Debord est donc un illusionniste, comme le mari de Mlle Claudia Schiffer. Mais les illusions vieillissent et les illusionnistes aussi, certaines idées, jamais. Ni le théorème de Thalès, ni celui de Pythagopre n'ont pris une seule ride.


J-P Voyer

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